Hommage à Dominique Kalifa
Figure éminente de l’université, historien exceptionnel et professeur estimé, Dominique Kalifa est décédé le samedi 12 septembre 2020. L’ensemble de la communauté de Paris 1 Panthéon-Sorbonne est en deuil et tient à lui rendre hommage.
C’est avec une tristesse infinie que l’université a appris la disparition de Dominique Kalifa. Professeur à Paris 1 Panthéon-Sorbonne depuis 2002, et directeur du centre de recherche en histoire du XIXe siècle, Dominique Kalifa était aimé et considéré par ses collègues et ses étudiants. Ils garderont de lui l’image d’une personnalité attachante et pudique.
Les témoignages et souvenirs se multiplient depuis l’annonce de son décès. Pour Jean-Marie Le Gall, directeur de l’UFR 09 : “L’École d’histoire de la Sorbonne est sous le choc. Elle perd dans des conditions brutales et tragiques une de ses plus grandes figures. Dominique était une grande autorité savante, invitée et reconnue au Brésil comme aux États-Unis. Son œuvre innovante et attrayante sur le crime, les bagnes et les bordels rencontrait les attentes du public comme celles des historiens soucieux d'explorer les terres inconnues des imaginaires sociaux. Mais il était aussi une autorité morale dans notre UFR. Sa classe, son élégance son intelligence, sa courtoisie et son humanité s’imposaient naturellement. Il faut se réjouir d'avoir connu un tel collègue et pleurer sa disparition qui nous prive d'un homme et d'un talent qui avaient encore beaucoup de bonheurs de lectures et de conversation à nous donner. Ce drame privé est donc aussi une perte pour le public et le monde savant. Il laisse des orphelins. Non seulement sa fille mais aussi ses disciples en master et doctorants qu'il faut aider.” Nicolas Offenstadt, maître de conférences en histoire a lui aussi rendu hommage à Dominique Kalifa sur Twitter : “Immense tristesse. l'historien Dominique Kalifa n'est plus. Je n'évoquerai pas son œuvre, on y reviendra beaucoup Mais à l'université aussi, dans la discrétion et la robustesse, il a fait tant avancer. Salut et merci, de très profond, Dominique, on n'oubliera rien de rien.” Il a également salué son engagement auprès de ses étudiants et collègues dans un article pour Libération.
Un grand historien
Dominique Kalifa a débuté sa carrière d’historien aux côtés de Michelle Perrot, qui a dirigé sa thèse, et d’Alain Corbin qui a présenté son dossier d’habilitation. Spécialiste de l’histoire du crime et des imaginaires sociaux, il a rédigé de nombreux ouvrages, tous salués par la critique. Son expertise du XIXe siècle est reconnue à travers le monde. Bertrand Tillier, professeur d’histoire contemporaine et directeur des Éditions de la Sorbonne, a rendu hommage à l’historien : ”Dominique Kalifa fut de ceux qui s’attachèrent à renouveler profondément le champ de l’histoire des sensibilités du XIXe siècle – son siècle de prédilection, dont il avait toutefois une conception extensive, lui permettant de s’aventurer jusque dans les années 1920 et 1930 et parfois plus tard encore. Son désir de déchiffrer le monde et ses signes l’incita à scruter des territoires peu explorés, jusque dans leurs recoins insoupçonnés, qu’il aimait éclairer pour en dévoiler et en comprendre les contradictions et la complexité.“
Les noms d’époque. De ”Restauration” à “Années de plomb”, est le dernier ouvrage collectif que Dominique Kalifa a dirigé. Paru en janvier 2020, il explore la notion de chrononymes - les noms d’époques - l’un de ses sujets de prédilection. L’historien décrivait ainsi ce recueil : “Les historiens ne se contentent pas de “découper l’histoire en tranches” – ce fut le titre du dernier livre de Jacques Le Goff, publié en 2014 –, ils la nomment également, la dotent de noms propres, ce qui est indispensable pour singulariser, donner une cohérence à des séquences du passé.” Le prochain numéro de la revue de l’université #1257 consacrera plusieurs pages à Dominique Kalifa et article à cet ouvrage.
► L’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne organise lundi 28 septembre un hommage à Dominique Kalifa
► Retrouvez la revue de presse spéciale hommage à Dominique Kalifa